Il n’est pas question d’en rester là : les habitants du nord du pays doivent eux aussi pouvoir compter pour leurs yeux sur des structures de santé solides et des spécialistes qualifiés. Un programme ophtalmologique national doit permettre de standardiser les soins et d’en améliorer durablement la qualité. Dans deux établissements de la région de Batken, dans le sud du pays, des ophtalmologues ont opéré l’an passé près d’un millier de personnes. Une option qui est loin d’avoir toujours existé : la clinique ophtalmique de l’hôpital de la province de Batken ne propose par exemple des traitements spécialisés que depuis 2018. Une évolution rendue possible par le Croissant-Rouge kirghize (CRK) et la Croix-Rouge suisse (CRS) – et financée par des dons d’or collectés en Suisse. En 2022, la vente d’or dentaire fondu et de vieux bijoux a ainsi permis à la CRS de générer près de 900 000 francs. Au total, l’organisation a investi plus de 1 million de francs dans des projets de médecine oculaire.
La CRS et le CRK ont contribué à la construction de la clinique ophtalmique de Batken et s’engagent pour que les ophtalmologues de la région puissent régulièrement échanger et mettre à jour leurs connaissances. Fin 2022, quatre jeunes spécialistes kirghizes ont ainsi eu l’occasion de suivre un perfectionnement spécialisé sur la chirurgie de la cataracte au célèbre institut Tilganga, au Népal. Peu de temps après, l’hôpital de Djalalabad a organisé une « master class » en lien avec cette formation et invité des ophtalmologues des provinces de Batken, Och et Djalalabad à un échange.
Des bénévoles qualifiés
Bermet Amatova, 15 ans, n’a pas eu besoin d’opération : il a suffi d’une paire de lunettes adaptée, reçue d’une équipe d’ophtalmologues venue mener des tests de la vue dans son village reculé de Chiy-Talaa. Des équipes mobiles composées de bénévoles qualifiés du CRK et de médecins se déplacent en effet régulièrement dans les régions périphériques, sensibilisant la population aux affections ophtalmiques fréquentes et aux traitements envisageables. Elles se rendent dans des écoles et des dispensaires pour contrôler les yeux des enfants comme des adultes. En 2022, elles ont testé la vue de 50 000 écoliers et procédé à plus de 200 000 traitements.
À ce jour, les équipes interviennent dans trois des sept provinces du pays. Elles travaillent main dans la main avec les autorités et les comités de santé locaux et s’appuient sur un précieux réseau : les patients atteints de troubles visuels sont redirigés vers l’hôpital le plus proche en vue d’examens complémentaires ou d’une opération. Comme dans le cas de Bermet Amatova, il est rare qu’une intervention chirurgicale soit nécessaire, explique Zarina Babadzhanova, responsable du programme ophtalmologique de la CRS et du CRK : « Dans plus de 80 % des cas, des lunettes de correction suffisent. » Une mesure simple et peu coûteuse qui peut changer une vie. Bermet Amatova, qui rêve de devenir actrice ou femme d’affaires, se réjouit : « Aujourd’hui, je lis sans problème ce qui est au tableau et dans les manuels. Je suis sûre que ça m’aidera à atteindre mes objectifs. »
Une chirurgie de plus en plus demandée
De plus en plus de gens sont sensibilisés à la santé oculaire et souhaitent se faire examiner, voire opérer. Le système de santé bénéficie heureusement du soutien de la CRS et du CRK, qui veillent à ce que les formations soient accessibles également au personnel soignant des dispensaires régionaux et font l’acquisition des équipements nécessaires : des tonomètres pour mesurer la pression intraoculaire, des réfractomètres pour déterminer la correction et des lampes à fente pour examiner au microscope la cornée, la conjonctive et le cristallin.
Des partenariats étroits
La CRS et le CRK s’engagent depuis 2016 pour que la population soit mieux informée sur la santé oculaire. Ils travaillent pour cela en étroite collaboration avec le ministère de la santé, l’OMS, l’Agence internationale pour la prévention de la cécité (IAPB) et l’union des comités villageois de santé (AVHC).
La CRS et le CRK s’engagent depuis 2016 pour que la population soit mieux informée sur la santé oculaire. Ils travaillent pour cela en étroite collaboration avec le ministère de la santé, l’OMS, l’Agence internationale pour la prévention de la cécité (IAPB) et l’union des comités villageois de santé (AVHC).
Ces partenariats ont un impact durable, à l’image de la coopération entre le CRK et les comités villageois bénévoles de l’AVHC – près de 900 comités et environ 10 000 bénévoles s’engageant dans leurs villages pour la prévention en matière de santé. Grâce à des échanges réguliers, les bénévoles du CRK et de l’AVHC améliorent leur travail et atteignent encore plus de personnes. La CRS et la Direction du développement et de la coopération ont aidé pendant de nombreuses années à la mise en place du réseau de l’AVHC, dans le contexte d’une réforme de santé nationale et d’un fort besoin de sensibilisation.
Le programme ophtalmologique national prend forme
Aujourd’hui, la CRS et le CRK contribuent à mettre sur pied le premier programme ophtalmologique national, basé sur les lignes directrices de l’IAPB. Ce programme doit permettre, via le déploiement de normes et de directives, d’uniformiser les soins ophtalmologiques et donc de les rendre plus sûrs. Il doit également garantir l’affectation à l’ophtalmologie de fonds publics plus importants. L’IAPB entend aussi faire profiter le pays de son expérience dans l’élaboration de stratégies sanitaires en collaboration avec différents ministères.
Actuellement, la CRS et le CRK accompagnent un groupe d’ophtalmologues dans la mise sur pied de protocoles cliniques basés sur des données probantes. Le but est de fixer des règles impératives pour le traitement de chaque maladie oculaire – cataracte, glaucome et bien d’autres encore – et ainsi de proposer à tous les patients du pays une prise en charge identique, conforme aux techniques les plus modernes.
Étendre l’engagement à tout le pays
L’action de longue haleine de la CRS et du CRK, rendue possible par les dons et les partenariats, a fait la preuve de son efficacité. Les deux sociétés soeurs ont donc décidé d’étendre à tout le pays leur engagement, très apprécié : à compter de 2024, elles porteront leurs campagnes de sensibilisation jusque dans les régions du nord et y renforceront la prise en charge.